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Entretien avec Matthieu Barret 
Matthieu Barret, Domaine du Coulet, Cornas

Comment as-tu démarré ? Tu es issu d’une famille de vigneron ? 

Oui et non, mon père absolument pas mais mon grand-père avait des vignes à Cornas et faisait du vin pour sa consommation personnelle. J’ai passé un BTS « viti-œno » et on a commencé en 2001 avec 3 hectares. En 2006 on a récupéré des vignes de la famille qui étaient en fermage, aujourd’hui on travaille sur 21 hectares. 

 

Quel est le terroir à Cornas ? 

À Cornas on est sur un terroir granitique très érodé certainement la dernière couche, avec des calcaires moins puissants que ceux qu’on trouve dans les Alpes, mais avec un profil beaucoup plus salin. On a aussi des sols Argilo-calcaires situés sur la limite de l’appellation.

Dans les vignes tu travailles comment ? 

Le plus naturellement possible. Depuis le début on travaille les sols à la mule avec Vivian, un prestataire de service, c’est une véritable collaboration car nous avons progressivement fait évoluer les vignes pour faciliter le passage de l’animal.

 

C’est une technique assez atypique dans la région, tu penses que tu as été précurseur ? On va dire que j’ai été l’allumette qui a démarré le feu, (rire)… Il faut savoir qu’on a été les premiers à faire du bio à Cornas dans les années 2000, on était les seuls pendant une dizaine d’années et progressivement plusieurs vignerons convaincus nous ont suivi. Même chose pour le travail du sol à cheval, souvent des jeunes qui ont travaillé chez nous et qui se sont ensuite installés. 

Tu appliques aussi des traitements en biodynamie ? 

Plus maintenant car cela a été une erreur, on a essayé pendant quelques années mais cela n’a pas fonctionné. On s’est rendu compte que cela fonctionnait bien sur des terres fertiles mais pas sur nos sols qui sont pauvres en argile et souvent trop secs. On a alors commencé à faire des apports en matière organique, non pas massifs mais plutôt réguliers avec l’idée de pouvoir lui donner l’énergie suffisante pour pouvoir dégrader la matière qu’on lui apporte. Si un sol ne contient pas assez d’azote cela lui demande trop d’énergie à dégrader au dépend de la croissance de ton pied de vigne. 

 

Favorises-tu aussi l’enherbement ?

Uniquement l’enherbement naturel, on n’ajoute rien. Je ne dis pas que ça ne fonctionne pas mais j’ai la sensation d’accélérer les choses et ça ne me convient pas. On part du principe que le sol fait pousser ce dont il a besoin pour s’équilibrer, on favorise donc l’herbe indigène pour la mise en place naturelle d’une prairie. A la vigne je suis partisan des choses simples, j’ai parfois l’impression que des vignerons se perdent dans des techniques complexes avec une grosse débauche d’énergie, alors qu’on obtient de meilleurs résultats en faisant des choix simples.

 

Tu as aussi beaucoup replanté ? 

Oui, essentiellement de la roussanne et de la marsanne ce qui est très courant dans la région mais aussi des cépages plus rustiques comme le Dureza qui est le père génétique de la syrah, cépage disparu mais

qui revient progressivement, on a aussi le projet de planter du Gringet sur la plaine, cépage ancien qui s’apparente au Savagnin, ainsi que du pinot sur Saint-Peray. On a tendance à replanter en altitude en réponse à l’évolution climatique.

Dans la cuvée « J’aurai ta peau » on reconnait ton côté ours qu’on retrouve depuis des années dans les titres de tes cuvées mais la couleur orange c’est assez récent dans tes vins et dans la région ? 

 

Oui ce n’est pas du tout culturel, (rire)…

Au départ ça ne m’intéressait pas du tout, c’est une demande d’un ami importateur. On a travaillé sur une macération de peau pendant 2 mois et un élevage en jarre de terre cuite en essayant d’apaiser le côté oxydatif de la roussanne et en mettant en valeur la gourmandise. Le résultat des deux premiers millésimes a été très différent sur la couleur et l’aspect trouble, les raisins avaient une peau beaucoup plus fine sur la dernière récolte, ce qui nous a piégé. Dans l’idéal j’aimerais obtenir une cuvée qui soit entre les deux avec un profil de vin bien différent des blancs de la vallée du Rhône, moins exubérant et beaucoup plus tendu.

« L’ours » c’est un surnom...

12/2022
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